mercredi 9 février 2011

“Si on a le ventre plein, on peut penser à se divertir. Mais si on a le ventre vide, on ne peut que penser à le remplir”

Les divertissements sont assez rares dans le quotidien de la plupart des Burkinabés. Déjà dans les villages, il n’y a pas grand-chose pour se divertir, à part le bistrot du coin… (c’est un peu comme les coins perdus du Valais…avec tout l’amour que j’ai pour les coins perdus du Valais). A Ouagadougou, par contre, il y a énormément de divertissements; comme dans une grande ville européenne (ciné, concerts, magasins, musée, expositions,…). Toutefois, le concept même de divertissement est inconnu pour beaucoup de Ouagalais.  En fait, c’est un peu le principe de la pyramide des besoins. Pour ceux qui ne connaissent pas, voilà en gros la pyramide… L’idée c’est que pour pouvoir se préoccuper d’un besoin d’un niveau supérieur, il faut d’abord satisfaire le niveau inférieur. Du coup, ici, comme la majorité peine à satisfaire le premier niveau, il est quasi impossible de se préoccuper des autres niveaux. Cela parait totalement futile et surtout inutile.

Du coup, les distractions se résument à ce qui est gratuit ou presque: la principale est la causerie… ensuite, on peut aussi jouer au foot, se coiffer, observer les habits des uns et des autres, danser, jouer un peu de musique… et surtout observer les autres (et bien évidemment les nassaras…)

Ouagadougou, règne des apparences

Une chose que j’ai remarquée depuis mon arrivée est l’importance du bien paraître. Beaucoup ont pour priorité d’être bien habillé, bien coiffé et d’avoir des biens matériaux. Une personne préfère se priver d’un bon repas et s’acheter un bel habit (qui sont chers par rapport au salaire des gens). Les gens qui peuvent s’acheter ces choses ne se privent pas de les montrer (téléphones, ordinateurs,…). Une expression beaucoup utilisée est “c’est un collier/une tenue mon-mari-est-capable”; ce qui signifie que en mettant ce vêtement la femme montre à toutes les autres qu’elle a de l’argent…

Du coup, on peut croiser des personnes super bien habillées et coiffées alors que chez elles, il n’y a ni eau, ni électricité, ni même à manger… d’un côté, c’est compréhensible; on n’a pas forcément envie que tout le monde sache qu’on est pauvre, c’est une question de fierté. D’un autre côté, il y a ceux qui exagèrent et qui font étalage de leur richesse.

tout ça pour dire que la société de l’apparence c’est pas que chez nous… mais ici ça me semble encore plus flagrant; les différences de richesse sont véritablement visibles au quotidien! En fait peut-être que chez nous, on ne les voit plus parce qu’on y est trop habitués…

J’ai intitulé ça: Avoir en permanence le sentiment d’avoir quatre oreilles ou être blanche au Burkina Faso

Avant de vous raconter quoique ce soit, juste un petit coucou pour tout ceux qui se sont souvenus de magnifiques moments en lisant le titre… (pour les autres ne soyez pas frustrés, je vous fais aussi coucou…)

Bref maintenant je m’explique… En étant blanche ici, je commence à comprendre que c’est peine perdue de passer inaperçue alors que je suis entourée de noirs. Je commence à comprendre mais je ne m’y habitue toujours pas… du coup, j’ai souvent l’impression d’avoir quatre oreilles, ou de ressembler à un Ovni vu la manière dont les gens me regardent…

En fait, c’est un événement un blanc qui passe !
Avec les enfants, c’est un sourire et un “nassara(blanc) bonjour” de loin, et parfois, un gamin un peu plus téméraire se risque à venir saluer de plus près ce blanc qui l’intrigue tellement. Lorsqu’il sert la main du blanc, beaucoup d’enfants sont tout étonnés; ils observent la main, puis lorsqu’ils repartent, souvent ils la sentent; histoire de voir comment sent le blanc (donc il faut souvent se laver les mains car vous imaginez l’image que se feraient les enfants si on pue des mains…)

Avec les adultes, les réactions sont un peu différentes:

Il y a déjà les hommes qui dès qu’ils voient une blanche, se disent que forcément il faut la marier… et en général, ils le disent après la troisième phrase de la conversation!
Ensuite, il y a ensuite ceux qui considère le nassara comme un personnage important qu’il faut, dans la mesure du possible, choyer et épargner de peur qu’il ne fuie trop rapidement. Il faut lui faire plaisir…
A l’inverse, il y a aussi une forme d’agressivité immédiate de la part de ceux qui considère que le blanc est responsable de tous les maux du continent et qu’il ne peut justifier sa présence ici qu’en distribuant à celui qui veut tous les euros dont il doit évidemment disposer…

C’est un peu caricatural et toutes les réactions ne se résument pas à ça mais il faut être conscient que des bribes de ses réactions seront de toute manière présente dans la relation; cela dépend des circonstances mais elles apparaitront quasi toutes à un moment donné… heureusement, en côtoyant régulièrement les mêmes personnes, les réactions “violentes” s’atténuent et c’est plus agréable!

dimanche 23 janvier 2011

Arrêtons de prendre l’Afrique pour une poubelle!

En travaillant à la bibliothèque, j'ai pas mal pesté contre les Suisses: je m'explique… Nous avons une salle remplie de livres envoyés de Suisse… (ce qui est une chance je ne dis pas le contraire) Malheureusement lors de l'envoi des livres, il n'a pas été suffisamment tenu compte de l'adaptation des livres au contexte de l'école (culture, programme scolaire...). Du coup, près de deux tiers des livres ne sont pas du tout adaptés!

Les Burkinabés ont la désagréable sensation que les livres ont été donnés, histoire de s’en débarrasser. C'est vrai que quand on voit certains livres on se demande ce qui a traversé la tête des gens: la passion du ski dans un pays où il fait froid ,15°, seulement quelques heures par jour et pendant quelques semaines.... Je ne jette pas la pierre aux Suisses qui ont certainement voulu bien faire mais sans connaitre ce n'est pas facile et j’aurais certainement fait les mêmes erreurs… mais il faut parfois savoir écouter les autres et prendre conseil auprès des personnes qui connaissent le contexte (et qui mieux que les burkinabés pour le faire?)

C’est pas évident de s’entendre dire: “de toute façon, les blancs donnent à l’Afrique ce qu’ils ne veulent plus parce que c’est trop vieux ou trop usé… ils se disent que ça pourra toujours servir aux Africains et ça leur donne bonne conscience… L’Afrique c’est la poubelle de l’Europe!”
Le plus dur à avaler c’est que c’est vrai!

Ici, on appelle ces marchandises envoyées de l’Europe les “au revoir France”… Au revoir France, Bonjour l’Afrique!

Début d’année 2011; quelques changements en vue…

Bon avant de commencer à vous raconter quoique ce soit… J’ai failli à tous mes devoirs en ce début d’année parce que je ne vous ai pas encore souhaité … suspens total…

UNE MERVEILLEUSE ANNEE 2011!!!

Que cette année comble tous vos désirs; qu’elle vous apporte la santé, le bonheur, du succès dans vos études ou votre travail, enfin bref que vous ayez envie de crier de joie tous les matins au réveil!!!

Maintenant que ça c’est fait... un peu de nouvelles de mes aventures abracadabrantes comme beaucoup me le disent…

Je ne suis plus en stage dans les classes mais je travaille à la création d’une bibliothèque destinée principalement aux élèves de l’école secondaire (ou plutôt ce qui devrait devenir une bibliothèque si tout va bien)... c'est cool même si c’est un peu l’inconnu... Donc je continue les cours informatiques et je m'occupe de la bibliothèque en parallèle...
Pour les cours informatiques, ça suit son cours et je vois petit à petit quelques progrès. Un changement aussi; comme un des enseignants est vraiment motivé par l’informatique et qu’il se débrouille plutôt bien, je me suis dit que ce serait bien qu’il puisse donner les cours aux élèves du primaire lorsque je ne serai plus là. Du coup, ça se met gentiment en place et il a commencé à donner les cours aux élèves de sa classe. Je lui donne des conseils et petit à petit, j’espère qu’il sera capable de gérer seul les cours. Il faut aussi qu’on voit comment organiser pour qu’il puisse gérer sa classe et donne les cours aux autres classes… Affaire à suivre…
voilà le topo pour la bibliothèque: des livres ont été reçus de Suisse, une petite salle a été aménagée, une personne responsable a été désignée. Normalement, cette personne aurait dû suivre une formation mais en fait elle n'a rien suivi; elle n'a donc que peu d’idées de la manière dont fonctionne une bibliothèque. Du coup, je suis censée l’aider à mettre en place la bibliothèque et la former à la gestion (évidemment je suis une professionnelle de la gestion de bibliothèque…) .
Ces deux semaines ont donc été consacrées à un remue-méninge intensif. D’abord, il m’a fallu comprendre le fonctionnement d’une bibliothèque européenne (c’est fou le nombre de choses à penser…). Ensuite, j’ai essayé de tenir compte du contexte africain; pour ça, je me dis qu’heureusement  que je n’ai pas commencé ce projet dès mon arrivée. Comme je commence à comprendre le fonctionnement burkinabé, c'est plus facile de créer un projet qui tienne la route: je pense que je risque moins de faire certaines erreurs que j'aurais faites en arrivant en septembre... en plus, en discutant avec les différentes personnes que je côtoie (surtout Franck qui est devenu le consultant attitré de la bibliothèque), je perçois mieux certains aspects. Bon la route n'est pas simple et je pense qu'il y aura pas mal d'obstacles à surmonter... mais c'est un beau défi!

Autre changement: les Ducommun, le couple suisse, sont partis... Ils continuent leur voyage. Au programme; marche de 3 semaines jusqu’au Bénin (les burkinabés les prennent pour des fous!), visite du Bénin puis envol pour la Tanzanie et safari, et enfin départ pour Madagascar. De belles découvertes en perspective! De mon côté, je me retrouve donc toute seule en tant que blanche mais ça devrait aller vu que maintenant je connais un peu de monde… mais nos petites discussions de suisse vont quand même me manquer (c’est parfois cool de pouvoir discuter avec quelqu’un qui a les mêmes références culturelles)…

Encore un changement : j'ai commencé la chorale de l'église où je vais à la messe. C'est trop cool de pouvoir chanter à nouveau et l'ambiance est vraiment sympa. Comme c'est une grande chorale (100 membres inscrits), pour l'instant je ne connais pas tout le monde et je suis un peu dans l’inconnu (même si je ne passe pas inaperçue comme ils disent… une blanche dans une chorale de 100 burkinabés c’est difficile à ne pas remarquer…). Mais je commence déjà à connaitre un peu les altis,  c’est cool de pouvoir discuter avec elles... Pour l’instant, je suis un peu perdue au niveau des chants; je revis les douloureux débuts en tant que nouveau où il y a une quantité de chants à apprendre… mais c’est motivant !